26 décembre 2009

FONDS DE TIROIR

La pluie de projets mirifiques d'une nouvelle patinoire et de proclamations hautes et fières de soutien au glorieux Servette Hockey-Cluc continue. Les radicaux proposent une nouvelle patinoire sur le parking des Vernets (un parking de moins, il est vrai que c'est toujours bon à prendre) ou sur le site de la gare des Eaux-Vives, les libéraux demandent au Conseil d'Etat de dégager un projet commun avec les communes et le club, sur un lieu précis (ça vaut mieux, en effet, parce qu'une patinoire sur un lieu imprécis, on voit mal à quoi ça peut ressembler, sinon à du brouillard givrant), et tout ça dans les cinq ans. Quant à Mark Muller, on nous sussurre que s'il ne soutient pas explicitement le projet de nouvelle patinoire dans le cadre du projet de méga-centre sportif de Plan-les-Ouates, il n'attend que le moment de chausser ses patins de combat pour envoyer le puck aux Charpines. Bref, tout le monde s'agite (même nous, pour préparer un référendum au cas où). Euh... y'a des élections bientôt ou quoi ?

Les conneries de l'Euro2008 se reproduisent pour le Mondial2010 : deux sociétés se disputant le marché des « fans zones » se sont retrouvées devant la justice, la première, Genevents, qui installera des écrans et des animations aux Vernets, accusant la seconde, CPF (la société du député radical Frédiric Hohl) de concurrence déloyale en proposant une deuxième « fan zone » et un deuxième écran géant à la Praille, en démarchant agressivement des commerçants (sans doute pas au courant du flop de la « fan zone » installée par les mêmes il y a deux ans au Bout du Monde), y compris des commerçants qui avaient déjà réservé un stand aux Vernets, en leur proposant par exemple la diffusion de spots sur un écran géant que la société en question n'a pas encore reçu l'autorisation d'installer. Quant à la police, elle s'inquiète : vu ses effectifs et les mobilisations déjà prévues (pour la « Lake Parade », qui se déroule le même jour que la finale du Mondial, par exemple), deux « fans zones » de 10'000 personnes chacune, c'est ingérable du point de vue sécuritaire. Vous allez voir que pour parfaire le comique de répétition, on va bien se retrouver à nouveau avec le grotesque ballon gonflable de l'Euro 2008 flottant (quand il n'y a pas de vent, ni de pluie) au dessus du jet d'eau, et qu'on va devoir à nouveau proposer une prime à qui trouvera le moyen de l'envoyer dans le lac...


La téléromande est toute contente : elle a réussi à attirer 412'000 spectateurs pour regarder la Suisse se faire sortir de l'Euro par la Turquie, et a atteint jusqu'à 48, 8 % de part de marché (55 % pour TSR 1, 42,9 pour TSR 2) pendant les "prime time" de la période de l'Eurofoot. Bon, cela dit, 412'000 spectateurs, ça fait guère qu'un gros quart de la population romande... Si on ajoute les chaînes françaises (TF1 et M6), qui font ensemble 21,4 % de part de marché, on arrive à un peu gros tiers de la population, ce qui correspond aux sondages effectués avant l'Eurofoot et qui indiquaient qu'un tiers de la population s'y intéressaient, un tiers s'en foutaient et un tiers y était allergique. Au bilan final, selon l'UEFA elle-même, l'Eurofoot a été suivi en moyenne par 155 millions de téléspectateurs, dans le monde entier, ce qui est bien moins que claironné avant l'"événement" : pour pouvoir affirmer que l'Eurofoot allait susciter un intérêt passionné, puis pour pouvoir confirmer qu'il suscitait effectivement un intérêt passionné, on avait sorti des estimations d'une crédibilité improbable, selon lesquelles 6,4 millions de personnes vivant en Suisse, soit 91,6 % de la population, nourrissons et grabataires compris, allaient regarder (et avaient regardé) au moins une fois une retransmission en direct d'un match de l'Euro. Selon la même statistiques, les hommes auraient passé 11 heures et demie devant la télé à regarder l'Eurofoot (ça équivaut grosso modo à six matches, en comptant la mi-temps) et les femmes 8 heures et demi (quatre matches et des poussières).

Une recherche visant à mettre en évidence comment les acteurs d'une grande manifestation sont amenés à intégrer l'évaluation des risques et les problèmes de sécurité dans l'organisation de la manifestation a été lancée par l'Ecole polytechnique fédéral de Lausanne. Elle est co-financée par l'EPFL et la Fédération internationale du foot professionnel, la FIFA. Mais pas, apparemment, par l'UIEFA. Ben ça alors, pour une surprise, c'est une surprise...

Le président de l'UEFA n'aimant pas la couleur orange, l'espace VIP du stade de la Praille a été repeint en bleu. Aux frais de qui, au juste ?

Idée géniale de plus : celle, lancée par le rédacteur de la revue "Tracés", Francesco Della Chiesa, et reprise (elle le mérite) par GHI : une scène flottante sur le lac, se promenant entre Genève, Lausanne, Montreux et Evian. Après la baudruche à Jobin, c'est vrai que ça manquait. Le lac, c'est devenu le marché aux puces ?

Les cailloux sur la plaine de Plainpalais ont été enlevés, parfois à la main, et remplacés par du gravier. "Nous avons veillé à ne fournir aucune munition à l'intérieur du site en cas d'échauffourées", a précisé l'inévitable député radical prébendier des à côtés de l'Euromachin, Frédéric Hohl.
En fait, on a pas enlevé les munitions, on a seulement changé leur calibre.

Après le dégonflage final de la baudruche à Jobin (qui s'enthousiasme pour l'effet de l'image de ce machin au dessus du jet d'eau, image qui a fait "le tour du monde"), Genève Tourisme annonce qu'elle évalue "l'impact publicitaire" de la chose, en essayant de comparer le coût d'annonces publicitaires payantes sur les 140 chaînes de télé qui ont diffusé l'image de la baudruche sur le jet.
C'est complétement con comme comparaison : de toutes façons, Genève ayant été, hélas, une des villes-hôtes de l'Eurofoot, des images du jet d'eau sans baudruche, auraient été diffusées sur les mêmes chaînes de télé que celles qui les ont diffusées avec baudruche. Et le jet d'eau aurait-il été illuminé en teinte vert caca d'oie que l'image aurait aussi "fait le tour du monde"...

Le Conseiller fédéral Moritz Leuenberger et ses homologues autrichien, allemand et liechtensteinois, ministres de l'environnement, se sont permis, les malpolis, de critiquer l'UEFA pour son absence de conscience environnementale, et pour les émissions de CO2 provoquées par l'Eurofoot. Ils sont bien naïfs, nos ministres de l'Environnement : attendre de l'UEFA qu'elle manifeste un soupçon de conscience environnementale ? Et pourquoi pas demander à l'UDC de défendre la solidarité internationale ?
De toute façon, l'UEFA a la conscience tranquille : elle fait dans l'humanitaire. Si, si. Elle s'est engagée à faire un dont de 4000 euros au CICR pour chaque but marqué.
Humanitaire, mais pingre.

Un fauconnier a été mandaté pour éloigner, grâce à des oiseaux de proie, les pigeons du Stade de la Praille, pigeons qui ont, comme tous les pigeons, la mauvaise habitude de chier sur les lieux qu'ils occupent. Une méthode "écologique, peu coûteuse et surtout très efficace", commente le directeur du stade, Carnazzola. Le contraire du stade, en somme. Et le directeur de se réjouir dans le "Matin Dimanche" du 25 mai : "les sièges et les vitres des loges ne sont plus souillés par les fientes" (il s'agit toujours des pigeons, pas des occupants des loges). Un faucon et deux buses vont donc patrouiller tous les jours au-dessus du stade pour en faire fuir les pigeons. Ce rapprochement entre le sport-pognon et l'ornythologie était, forcément, dans l'air : dans le feuilleton de la Praille et de l'Eurofoot, les buses, les (vrais ou faux)cons et les pigeons sont présents depuis le début.

Souvenirs (dans "Le Temps" du 27 mai) du gardien de l'équipe suisse de foot lors de la Coupe du monde 1954 (elle se déroulait en Suisse), Eugène Parlier, dit "Gégène" ) : les joueurs avaient reçu en tout en pour tout 900 balles de dédommagement (ils avaient tous un boulot à côté), une caisse de "vivi-cola" et vingt paquets de clopes "Marocaines"... Et ils avaient abouti en demi-finale. Ben dis donc, ça nous rajeunit pas...

Une série humoristique produite par la télé romande (et deux chaînes privées françaises), "futurofoot", s'est attirée les foudres de l'UEFA, qui en a interdit (elle en avait donc le pouvoir ?) la diffusion dans la "fan-zone" de Plainpalais, en l'accusant de se moquer "du football, de ses instances, de ses règles et de sa philosophie" en montrant des "contenus sexuels (...) ainsi que des scènes de violence" (docteurs battant des joueurs, joueurs se battant entre eux, bagarres entre arbitres et joueurs). Les sketches (ou officie Jean-Luc Bideau en "professeur Blotter") expliquent "comment soudoyer un arbitre", "comment provoquer un joueur sans se faire sanctionner", "comment marquer ou arrêter un pénalty à coup sûr". Elle a raison, l'UEFA, de critiquer "futurofoot" : c'est pas une série humoristique, c'est un documentaire... Le réalisateur dudit documentaire, Nicolas Wadimoff, trouve judicieusement à la lettre de l'UEFA "un ton hallucinant sorti tout droit de l'ère stalinienne", et fait observer que les "fan-zones" sont carrément devenues des "zones UEFA, où il faut penser UEFA, rire UEFA" ("Le Matin Dimanche" du 25 mai). Ouais. Mais c'est pas seulement la fan-zone de Plainpalais qui était une "zone UEFA" : c'était tout Genève.

Selon deux enquêtes de l'Institut de recherches et études des media publicitaires (REMP), 15 % de la population susse joue au foot pour le plaisir et pas pour le pognon), et un footballeur amateur sur cinq est une footballeuse (une sur quatre chez les moins de 35 ans). La pratique du foot amateur concerne 16 % des Alémaniques, 11 % des Romands et 10 % des Tessinois. La proportion de fumeurs est plus élevée (31 %) chez les footballeurs amateurs que dans l'ensemble de la population (29 %), mais ils consomment moins d'alcool. Les supporters compensent.

La plupart des ballons de foot sont fabriqués à la main, au Pakistan, et plus particulièrement à Sialkot, dans le Pendjab, où 35'000 personnes (femmes et hommes, mais aussi, encore, des enfants) fabriquent vingt millions de ballons par an. Jusqu'en 1996 au moins, cette production était en grande partie assurée par des enfants, travaillant à domicile, et exclus de l'école par leur travail. 17'000 enfants et 42'000 adultes travaillaient dans la fabrication des ballons de foot en 1996. En 1997, un traité conclu entre les producteurs, l'UNICEF et l'OIT interdisait le travail des enfants de moins de 14 ans. Ce traité a produit des effets : 10'000 enfants ont pu suivre l'école primaire, 5000 continuer leur formation ensuite -mais les familles ont pertdu une source de revenu, et la rémunération du travail ne s'est pas améliorée -elle a même baissé de 10 % en dix ans. Aujourd'hui, les ouvriers, payée à la pièce, gagnent 40 à 75 centimes par ballon fabriqué dans les conditions "normales", ou 50 % de plus pour ceux fabriqués dans les conditions du commerce équitable -on trouve ces "ballons équitables" dans le commerce chez nous, pour un prix à peine supérieur à celui des autres.
La Suisse importe chaque année un million et demi de ballons de foot, vendus entre vingt et quarante francs. Les écoles achètent 20 à 30 % de cette marchandise, sans trop vérifier si elle a été produite dans les conditions habituelles de servage ou celles du "commerce équitable". Il est donc vraisemblable que des écoles de notre beau pays achètent des ballons "fabriqués dans des conditions de misère" et d'exploitation, comme le signale l'Oeuvre suisse d'entraide ouvrière (OSEO). Avant l'Eurofoot, le Crédit Suisse avait eu l'idée géniale de lancer une opération marketing en distribuant 200'000 ballons de foot. Avant qu'on lui fasse remarquer qu'une bonne partie de la production de ces ballons était encore assurée par des enfants, ce qui a finalement poussé la banque à faire un don d'un million à l'UNICEF. Quand à la Fédération internationale du foot professionnel, la FIFA, elle a "interdit" aux entreprises qu'elle certifie de faire travailler des enfants, mais comme elle ne fait aucune vérification préalable et ne sanctionne une violation de cette interdiction qu'a posteriori, une fois l'infraction dénoncée (quand elle l'est), constatée (quand on en fait l'effort) et prouvée (quand on le peut), cette interdiction est probablement aussi souvent violée que les règles du foot lors des matches internationaux. Surtout que les "entreprises certifiées" font fréquemment appel à des sous-traitants qui, eux, ne sont pas "certifiés".

Selon l'"England Journal of Medecine", regarder un match de foot à "fort enjeu" augmente le risque d'accident cardiaque. Les services d'urgence enregistrent un pic de fréquentation dans les deux heures suivant le coup d'envoi d'une rencontre sportive, et certains cardiologues se demandent s'il ne faudrait pas, par prophylaxie, supprimer l'épreuve des "tirs au but". Des médecins français recommandent à leurs patients sortant d'infarctus de ne pas regarder de matches de foot importants. En 2006, lors du Mondial de foot, les hospitalisations ont augmenté de 25 % en Allemagne. Il s'agit certes dans la plupart des cas de pathologies bénignes, mais comme les Urgences sont déjà encombrées, ces pathologies bénignes les ont encombrées encore plus. Lors de la Coupe du monde en Allemagne, le nombre de malaises cardiaques a doublé à Munich, et le risque d'accident cardiaque pendant les matches de l'équipe allemande a été 3,26 fois plus élevé pour les hommes, et 1,82 fois plus élevé pour les femmes, que normalement. Au sein de la population souffrant de problèmes artériels, les malaises ont quadruplé.
D'où les bons conseils du "Matin Dimanche" du 1er juin : pendant les matches, "bougez au moins les jambes de temps en temps", "évitez l'alcool", "n'oubliez pas vos médicaments", "regardez les matches avec des amis ou de la famille" (ils appelleront les secours), et "Composez le 144 en cas d'urgence".
Ce serait pas plus simple de se faire carrément hospitaliser avant le début du match ?

Selon la gendarmerie genevoise, le record d'alcoolémie enregistré durant l'Eurofoot s'est établi à 3,67 pour mille chez les hommes et 2,69 pour mille chez les femmes.
L'égalité avance à grands pas. Enfin... quand elle arrive encore à tenir debout.

On estime à 770 tonnes par an la consommation mondiale de produits dopants, en ne tenant compte que des stéroïdes anabolisants et de la testostérone. ça correspond annuellement à 14 milliards de doses de stéroïdes et 34 milliards de doses d'EPO et GH, et à 15 millions de consommateurs de stéroïdes, 1 million et demi de testostérone et deux millions d'EPO et GH. Les sportifs, professionnels ou amateurs, constituent la très grande majorité des consommateurs de ces saloperies : de 38 à 40 % des consommateurs se trouvent dans la clientèle des salles de gymnastique (et des professionnels de la sécurité), et de 35 à 37 % chez les athlètes, tous sports confondus ("Le Monde", 17 juin 2008).

La consommation de bière, de saucisses et de chips a été dopée par l'Eurofoot en Suisse : en juin, les ventes de bière ont augmenté de 15 % par rapport à juin 2007, les ventes de saucisses de 11 %, les ventes de chips de 9 %, les ventes de cacahouètes, noix et graines salées de 6 %, celles d'articles de sport de 15 %. En revanche, les ventes de télévisions, d'équipements vidéo et d'appareils de photo ont reculé de 3 à 25 %. Tout le monde ne peut pas faire du fric au même moment.

Depuis deux ans, l'Autriche s'entraînait intensivement pour l'Euro. En août 2006, une jeune femme, Natascha Kampusch, réussissait à s'évader d'une cave où elle avait été séquestrée pendant huit ans et demi près de Vienne. En avril 2008, on découvrait qu'un homme séquestrait depuis des années sa propre fille dans une cave, après l'avoir violée et lui avoir fait sept enfants. En mai 2008, enfin, un homme de 39 ans tuait toute sa famille à coups de hache au prétexte d'éviter à ses proches la honte de sa propre ruine. L'équipe autrichienne de foot (qualifiée d'office pour l'Euro) commençait à faire peur à ses adversaires.
Pourtant, selon un sondage, juste avant le début de la compétition, 34 % des Autrichien-ne-s se disaient "pas du tout intéressés" par l'Eurofoot, et 22 % "peu intéressés". Et en septembre 2007, une pétition avait été lancée sous le titre "l'Autriche sait se tenir" pour que l'Autriche, qualifiée d'office pour l'Euro puisqu'organisatrice (comme la Suisse : pour concourir, on n'a pas besoin de jouer, suffit de payer) se désiste du tournoi en raison de son faible niveau footbalistique, et pour permettre à des équipes plus dignes de participer à l'Eurofoot d'y participer. En un mois, la pétition avait réuni 10'000 signatures.

Un criminel de guerre croate, l'Oustachi Milijov Asner, ancien chef de la police du régime fasciste d'Ante Pavelitch, 95 ans aux fraises et supporter de la Croatie, a été repéré et photographié à la terreasse d'un café de Klagenfurt. Jugé "sénile" par la justice autrichienne, et donc inapte à être jugé, il est présenté par le Centre Simon-Wiesenthal comme un exemple de la protection accordée par l'Autriche à d'anciens criminels de guerre. Un autre exemple d'un passé qui ne veut pas passer, c'est le lieu de la finale de l'eurofoot : un stade viennois au passé nazi. Ben quoi ? Pour les dieux du stade, ça vaut bien Nuremberg, non ?

Selon les chiffres publiés par "Le Temps" (du 31 mai), 146'300 juniors sont inscrits à un club de foot en 2008 en Suisse, dont 19'000 filles. En dix ans, le nombre des juniors inscrits dans un club a augmenté de 20 %, pendant que, dans le même temps, les clubs d'athlétisme perdaient la moitié de leurs juniors.

Après l'Euro2008 de foot, le Mondial2009 de hockey. Et donc, après Flix et Trix, Cooly. Cooly, c'est la mascotte choisie pour le championnat du monde 2009 de Hockey sur glace, qui se tiendra en Suisse. Et Cooly, c'est une vache. Une vache pour un championnat du monde de hockey, ça tombe sous le sens. Mais on ne sait pas trop sous quel sens.

L'Etat, la Fondation pour le tourisme, Genève Tourisme et la commission cantonale du Sport Toto ont claqué 360'000 balles poour faire flotter un gros ballon (de quinze mètres de diamètre) au-dessus du jet d'eau (du moins quand le vent ne souffle pas à plus de 30 km/h). Le machin était retenu par trois cables, deux fixés sur la jetée, un relié à une barge flottante. L'installation des points d'amarrage avait nécessité la pose de 40 tonnes de merdier dans le lac, et la mise à l'eau d'une barge équipée d'un treuil. Et il a fallu mobiliser une quinzaine de spécialistes, le 23 avril, pour mettre en place cette grosse connerie.

L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et l'Association des ligues de football professionnel ont signé le 14 avril un accord de coopération pour la promotion d'initiatives visant à sensibiliser le public aux questions relatives à la sécurité alimentaire et à la lutte contre la faim. Les deux organisations estiment que le pouvoir du football est un outil efficace au service du développement et pour la promotion de la lutte contre la faim dans le monde ainsi que pour atteindre l'objectif de réduire de moitié d'ici à 2015 le nombre de personnes souffrant de la faim et de la pauvreté. Tout ça est très bien. Mais vu la quantité de saloperies diverses que les supporters de foot vont bâfrer pendant l'Euro, faudrait voir à signer un autre accord de coopération : pour la lutte contre la goinfrerie et l'obésité.

Après les JO de Pekin, se tiendront les JO (d'hiver) de Vancouver, en 2010. Et là encore, y'a des indigènes qui râlent. Pas des Tibétains, évidemment, mais des Amérindiens. Les maudits sauvages râlent contre la constructions de nouvelles infrastructures sur des territoires qui sont supposés être les leurs, et n'ont jamais été cédés au gouvernement fédéral ni à la province : Hôtels, télécabines et parkings devraient fleurir sur les dernières terres de chasse intactes de la nation Salish. Qui n'a jamais été consultée ni par le comité olympique local, ni par le CIO. Font chier les peaux-rouges, ils savent pas qu'ils ont été battus par John Wayne ?

Quant aux JO de Pekin, ils se seront tenus dans une ville nettoyée de ses dissidents : Fin juillet, Amnesty International fait le point sur les "valeurs de la Charte olympique" (qui veut "encourager une société pacifique, soucieuse de préserver la dignité humaine"), confrontées à la réalité chinoise. Bilan : les condamnations à mort et les exécutions (8000 par an) se poursuivent, les "rééducations par le travail" pour les petits délinquants et déviants divers aussi, la pression et la répression sur les défenseurs des droits humains itou, la censure s'est renforcée contre les journalistes et sur internet, les minorités nationales, en particulier les tibétains et les ouïgours, sont ciblées... dès fin décembre 2007, la police a commencé à arrêter et à mettre en résidence surveillée des dizaines de militants des droits humains, d'intellectuels critiques et d'avocats des uns et des autres. Ce qui n'émeut pas le président du Comité international olympique (CIO), Jacques Rogge, qui ne cesse de répéter qu'il ne faut pas "mélanger le sport et la politique", qu'il ne faut pas "demander au CIO de régler tous les problèmes de la planète" (d'ailleurs, nous, on ne lui demande rien, au CIO), que le CIO est une "organisation sportive" (formée tout de même de comités nationaux contrôlés, de près ou de loin, par des Etats) et qui a déclaré au "Financial Times" qu'il fallait se montrer "patients" avec la Chine, étant donné son histoire. Et aux journaliste du "Temps" qui lui rappellent que la Charte olympique, dans son art. 5, "fait référence aux droits de l'Homme", Rogge répond : "Nous défendons le principe général des droits de l'Homme, sans entrer dans le domaine spécifique du monde de la politique". C'est commode, ça fait des droits de l'Homme une sorte d'ectoplasme métaphysique sans contenu réel, et ça évite d'avoir à se battre pour les faire respecter.

Le 27 juillet, le Secrétaire Général et l'Assemblée générale de l'ONU ont lancé un "appel solennel" à tous les Etats membres pour une "trêve olympique" dès l'ouverture des jeux, le 8 août, afin de "permettre de réfléchir au prix élevé de la guerre, d'ouvrir un dialogue et d'apporter une assistance aux populations qui souffrent d'un conflit".
Résultat : pendant les Jeux, la Géorgie attaque l'Ossétie du Sud, la Russie envahit la Géorgie, la guerre se poursuit en Afghanistan et en Irak...

La Coupe du Monde 2014 aura lieu au Brésil -qui était le seul pays en lice, le 30 octobre 2007, lors de la décision par la FIFA. "Une Coupe du monde au Brésil, c'est comme aller en pélerinage à La Macque, à Saint-Jacques de Compostelle ou à Jerusalem", a déclaré, inspiré par le Très-Haut, le président de l'UEFA, Saint Michel Platini. ça va pas être facile de jouer au foot prosterné ou à genoux. Quant à l'écrivain Paulo Coelho, il a tenté de plaisanter : "l'émotion du foot dure plus longtemps que le sexe. Mais ce n'est pas meilleur". L'humour de Coelho est du même niveau que ses bouquins.
Quant au Brésil, il a promis un "Mondial" social et écologique. On jouera donc, dans un Mondial sans sponsors et sans hymnes nationaux les matches dans des terrains vagues avec des ballons en fibres végétales, dans des matches mettant aux prises des équipes d'amateurs. Non ? Ah bon...

"Le Courrier" casse l'ambiance de la "grande fête du foot" en rappelant (le 13 juin) ce à quoi ont servi, et ce qu'on pu provoquer, les matches de quelques équipes nationales en compétition internationale :
- match entre l'Italie fasciste et l'Espagne républicaine au Mondial de 1934 : plusieurs joueurs espagnols blessés, le match est annulé;
- match entre l'Italie fasciste et la Hongrie fasciste en 1938 au Mondial : les Italiens reçoivent la coupe en uniforme militaire;
- match entre une équipe ukrainienne et une équipe allemande en 1942 à Kiev. Les Ukrainiens gagnent. Toute l'équipe ukrainienne est arrêtée par la Gestapo, tous les joueurs sont torturés et déportés, beaucoup meurent dans les camps.
- match entre le Perou et l'Argentine en 1964 à Lima. L'arbitre annule un but péruvien, les spectateurs protestent, deux d'entre eux déboulent sur le terrain, la police tire des coups de feu en l'air et provoque une panique qui fait 320 morts et 800 blessés.
- matches éliminatoire du Mondial entre le Honduras et le Salvador en 1969 : le Salvador perd le match aller au Honduras, gagne le match retour à domicile après que l'hôtel des joueurs honduriens ait été incendié. Des échauffourées font deux morts. Le Salvador gagne ensuite le match de barrage au Mexique. Une guerre éclate entre le Salvador et le Honduras, elle dure une semaine, fait 2000 morts et des milliers de blessés.

Selon le sexologue Ronald Virag, les hommes préfèrent désormais le foot et la télé au sexe, et le mois de l'Eurofoot s'annoncerait particulièrement déprimant pour les couples (mais assez excitant, en revanche, pour les hommes célibataires en chasse d'épouses de supporters).

11 décembre 2009

APRES L'EURORACKET, LES J.O.RACKET ?

Deux visionnaires, le directeur de l'Hôtel de Rhône, Marco Torriani, et le président de Genève Tourisme, Jean-Pierre Jobin, ont donc eu une idée de génie, reprise (c'est dire si c'est une idée de génie) par Mark Muller et la "Tribune de Genève" : faire organiser les Jeux Olympiques d'hiver 2018 à Genève. C'est vrai que ça manquait à notre station de sports d'hiver. Torriani et Jobin ont donc monté un comité exploratoire, pompé 200'000 francs au Sport Toto, et sont allés quémander des soutiens moraux divers et variés. Ils ont obtenu notamment celui, comme on s'y attendait, de Mark Muller, toujours partant pour soutenir ce genre de foutaises (invariablement qualifiées de projets "ambitieux et enthousiasmant", youpie !). Dans la "Tribune" du 27 juin, le rédac'chef nous pond carrément un édito orgasmique : Non seulement "l'Euro2008 est un succès total que même le fiasco du Bout-du-Monde ne peut entamer" (faudra qu'on nous explique comment un succès contenant un fiasco peut être total...)" et l'image de la baudruche à Jobin sur le jet d'eau a été une image "parfaite", mais "dans la griserie de l'instant" (raaaah lovely) "un seul projet semble désormais capable de satisfaire l'appétit des nouveaux rois de l'événement" et de leurs porte-plumes : les JO 2018, qui ramèneraient "l'Euro aux dimensions d'une belle fête foraine", et permettraient en plus aux fétichistes de la bagnole et aux drogués du béton de nous coller la traversée routière de la rade, la troisième voie autoroutière et un nouvel aéroport. Reste plus que quelques détails à peaufiner : s'assurer "l'appui des autres cantons, de la Confédération et de la France voisine" (Ruetschi a oublié l'Union européenne et l'ONU, mais ça doit être dans l'exaltation du moment), et surtout du peuple (qui devra se prononcer), de "Swiss Olympic" (l'organe faîtier de l'olympisme en Helvétie), qui avait déclaré renoncer à une candidature suisse pour 2018, et des instances olympiques (qui, comme l'UEFA pour l'Euro, ne donneront pas leur appui mais le vendront, très cher) et du "reste du monde", qui évidemment n'a que ça comme préoccupation essentielle. Les promoteurs des JO de Genève veulent encore trouver une personnalié qui soit la "figure de proue" du projet (Mark Muller pense à Stéphane Lambiel, Pirmin Zurbriggen ou Didier Cuche, c'est dire la hauteur des figures de proue...). Et Marc Roger, alors, on l'oublie ?
Quant à nous, on va devoir tirer les leçons de l'Euroracket pour éviter les JOracket, et nous y prendre assez tôt pour faire capoter un projet encore plus imbécile que celui dont on vient de sortir. Parce que "si la candidature (genevoise) se concrétise, les Genevois devront voter en 2009". Mais aussi, si nous les y convions, à chaque demande de crédit, à chaque projet de loi, à chaque déclassement de zone, en 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, 2015, 2016 et 2017...
De toute façon, une candidature genevoise aux JO de 2018 aurait apparemment peu de chances : les Jeux Olympiques étant organisés non par des pays mais par des villes (ce que Manuel Tornare n'a pas manqué de rappeler à Mark Muller), et les règles de Swiss Olympic (qui n'a d'ailleurs même pas été informée de la pseudo-candidature genevoise, et avait même annoncé qu'il n'y aurait pas de candidature suisse pour les jeux de 2018) imposant une ratification des candidatures par vote populaire (communal ou cantonal, voire les deux), les Genevois (de la Ville en tous cas, et du canton en plus, vraisemblablement) devront obligatoirement être consultés, et pas seulement sur le principe : aussi sur un crédit d'investissement, une subvention, une garantie de déficit -bref, le montant officiel du racket. Racket dont Mark Muller assure qu'il n'a "aucune idée".
Et c'est là qu'on va rigoler. Parce que le budget d'une plaisanterie du genre JO d'hiver va avoisiner les deux milliards (c'était le budget des JO de Turin en 2006), soit deux ans de budget total de la Ville. Dans une Ville (et un canton) incapables de payer les 150 millions de son stade vide, c'est peut-être un peu excessif. Autant dire que le gag de Jobin et Torriani risque de faire long feu. D'autant que pour "Swiss Olympic", une candidature suisse pour 2018 n'aurait "pas de sens et quasiment aucune chance", les jeux précédents (2014) se déroulant déjà en Europe (à Sotchi, en Russie, aux portes de l'Abkhazie et de la Géorgie, va y'avoir du sport) et la règle étant celle d'un tournus entre continents (il y a déjà deux candidatures asiatiques et une candidature américaine).. En plus, Swiss Olympic doute de la ferveur populaire invoquée par Mark Muller. Et Manuel Tornare de la pertinence de la comparaison avec l'Eurofoot : organiser des Jeux Olympiques, même d'hiver, c'est autrement plus complexe que d'accueillir trois matches de foot.

Cela dit, faut les comprendre, les taborniaux qui veulent organiser des JO d'hiver à Piogre : comme l'UEFA, le CIO est une gigantesque pompe à fric (depuis le début de l'ère Samaranch, en 1984). Durant l'olympiade 2004-2008, le mouvement olympique aura perçu cinq milliards de revenus. Plus de la moitié (53 %) des revenus du mouvement olympique proviennent des droits de retransmission télé, les sponsors suivent avec 34 %, la billetterie traîne avec 11 %, les produits dérivés dérivent avec 2 %. Le CIO perçoit 8 % de cette manne et reverse le reste aux comités d'organisation des Jeux, ainsi (mais dans une moindre mesure) aux fédérations des sports olympiques et aux comités olympiques nationaux, et quelques miettes au comité international paralympique et à l'Agence mondiale antidopage. Dans un programme de financement "TOP" (T he Olympic Partner") étaient réunies pour les JO de Pékin douze multinationales (Coca-Cola, Visa, Panasonic, Kodak, McDonald's, Samsung, Lenovo) qui ont payé 866 millions de dollars le droit d'utiliser l'emblème olympique. Dans le Comité d'organisation des JO de Pekin (BOCOG), on trouvait 35 entreprises (la plupart chinoises, mais aussi des multinationales comme Adidas ou Volkswagen) qui payaient chacune 28,5 millions (soit un milliard au total), plus des prestations en nature (VW fournit 5000 véhicules, Adidas habille les volontaires), dans l'attente d'un bon retour sur investissement (Adidas attend un retour immédiat de 100 millions, soit trois fois sa mise, et le doublement de ses points de vente en Chine). Pour la première fois, les montants perçus par le sponsoring national (700 millions) ont dépassé ceux du sponsoring international (500 millions). L'addition des deux n'atteindra toutefois pas le total des droits de télévision : 1,7 milliard de dollars). Quant à la billetterie, elle atteint tout juste (selon les prévisions) la centaine de millions. Une paille. Une grosse paille, mais une paille.
Le temps passe : en 1948, lors des premiers jeux télévisés, la BBC avait payé ses droits 800 balles. Et le CIO les lui avaient rendu, parce qu'il avait fait du bénéfice. Il fera évidemment un bénéfice incomparable en 2008, mais ne rendra rien des centaines de millions (1,737 milliard de dollars) qu'il aura encaissé en droits TV. La seule chaîne américaine NBC a payà 894 millions de dollars, ce qui lui donnait le pouvoir d'imposer les horaires des compétitions pour qu'elles passent à de bonnes heures pour ses téléspectateurs, et surtout ses annonceurs. L'Europe suivait à bonne distance, avec 400 millions de droits (pour tous les pays d'Europe réunis, de l'Alantique à l'Oural).