27 mars 2012

Brèves

Les créanciers du Servette FC de Magic Pilchard s'organisent : fatigués d'attendre que le gros poisson leur paie ce qu'il leur doit, ils ont décidé de faire valoir leurs droits collectivement plutôt que chacun pour soi. Une dizaine d'entreprises créancières se sont donc réunies lundi soir. Ensemble, elles représentent plus de 400'000 balles de créances diverses (plus que le capital, 320'000 balles, de la SA du club. Quatre de ces entreprises ont déjà mis le SFC aux poursuites, l'une d'entre elles avait menacé de le mettre en faillite avant de recevoir un acompte, et le Servette doit en plus une centaine de milliers de francs aux Services Industriels. Quelque chose nous dit qu'on n'a pas fini de rigoler. On a mauvais esprit.

Les Jeux Olympiques d'hiver se dérouleront à Sotchi, en Russie (sur la mer Noire). Et comme tous les jeux olympiques d'hiver et d'été précédents, leur préparation et l'installation des équipements font table rase des droits des habitants du coin (après qu'on leur ait promis monts et merveilles). C'est ainsi que les propriétaires de logements d'une cité d'habitation du quartier Makarenko risque fort de perdre leur logement : la cité doit carrément être rasée pour faire un parking. Les habitants avaient investi tout leur avoir dans l'achat d'un logement (entre 3,5 et 6 millions de roubles), la cité n'est même pas encore achevée (mais une quinzaine de familles y sont déjà installées) et voilà qu'on annonce qu'elle va être démolie au printemps par la société qui édifie les sites olympiques. Prétexte : le quartier a été construit sans base légale, le promoteur est en prison et toutes les collectivités publiques concernées (la Ville de Sotchi, la région, la Russie) jurent qu'elle ne peuvent rien faire. Comme si elles n'étaient pas au courant qu'un quartier entier s'édifiait et qu'on y avait amené gaz, électricité et eau courante. Le Comité international olympique reste d'un calme olympien : il assure qu'il prend « très au sérieux la question des déplacements de personnes en relation avec la construction des sites olympiques ». Il le prend même autant au sérieux que Poutine la question de la liberté des élections présidentielles. C'est dire. Qu'ajouter ? Ah oui, on a failli oublier : « vive le sport ! ».

Le Conseiller d'Etat Charles Beer et le Conseiller administratif Sami Kanaan, tous deux socialistes et tous deux « ministres des sports » sont un peu fâchés : ils ont l'impression que le demi-million de subventions accordées au FC Servette pour le soutien à la formation et au mouvement juniors ont été, au moins partiellement, utilisés pour boucher les trous financier de la SA du club . Beer et Kanaan ont donc saisi la Cour des Comptes pour qu'elle se penche sur la comptabilité, apparemment assez inventive, du centre de formation du SFC. Le Servette de Pisghyar a reçu 523'000 balles de subventions du canton (250'000) et de la Ville (273'700) en 2011 pour faire fonctionner son centre de formation et payer ceux qui l'animent, mais le responsable technique du centre n'a pas été payé depuis décembre (et a démissionné) et les entraîneurs du centre attendaient encore le 21 février leurs salaires de janvier. Quant aux joueurs de l'équipe « adulte », certains ont été payée intégralement, d'autres partiellement et attendaient toujours, eux aussi, leurs salaires de janvier. En revanche, les créanciers les plus pressés, ceux qui menaçaient de demander la mise en faillite du SFC, ont été au moins partiellement remboursés. Mais s'ils l'ont été grâce aux fonds versés par le canton et la Ville pour la formation et les juniors, ces fonds auraient alors été détournés de leur affectation (l'administrateur du club a d'ailleur appelé personnellement le Conseil d'Etat pour lui demander de régler les salaires en souffrance...). Et ça la foutrait mal dans le paysage. Bon, bref, on attend avec gourmandise le rapport de la Cour des Comptes. On aime bien rigoler avec le sport.

15 mars 2012

Brèves

Nouvelle du sport créateur de lien social, producteur de respect et terreau de fraternité : les directeurs cantonaux de justice et police ont soumis à consultation de nouvelles mesures de lutte contre le hooliganisme et les violences dans les stades et à leurs alentours. Leurs proposition de révision du «Concordat instituant des mesures contre la violence lors de manifestations sportives» prévoit un régime général d'autorisation préalable des autorités cantonales pour les matches de « super ligue » de foot et de « ligue nationale A » de hockey (on vous fait grâce du nom officiel, forcément en anglais, de ces réjouissances), et éventuellement pour certaines rencontres « à risque » dans les ligues inférieures. En contrepartie de l'autorisation, les autorités pourraient exiger des clubs (et des stades) des mesures de prévention sécuritaire : installation de caméras haute définition, présence d'agents de sécurité en nombre suffisant, interdiction de la vente d'alcool, restrictions dans la vente des billets, contrôles d'identité. Comment croyez-vous que les faîtières du sport professionnel ont réagi à ces propositions ? Vous avez gagné : elles sont contre. Parce que ça va leur coûter des sous. Et que le pognon, dans le sport professionnel, c'est le premier souci des clubs et des stades. Le pognon, pas le sport. Après tout, se foutre sur la gueule à l'entrée du stade, dans le stade et autour du stade, c'est aussi un sport, non ? Et appliquer aux manifestations sportives un régime identique à celui des manifestations politiques, ça serait plutôt rehausser le statut des premières, non ?

Dans le fichier central des supporters violents de foot ou de hockey, que tient la police fédérale depuis 2007, 1198 personnes étaient fichées en octobre 2011 (200 de plus qu'en janvier 2010). Dont seulement 9 femmes et une dizaine de mineurs. Le 70 % de ces hooligans sont fans de foot, 30 % de hockey. Les infractions les plus fréquentes qui leur sont reprochées sont l'émeute, les infractions à la loi sur les explosifs, les dommages à la propriété et les menaces contre les autorités et les fonctionnaires. On dirait presque un casier judiciaire de vieux gauchiste. Mais alors, pourquoi la loi sur les manifestations que propose la droite genevoise ne s'applique-t-elle qu'aux manifestations politiques et pas aux manifestations sportives alors que les directeurs cantonaux de Justice et Police les ont dans le colimateur -ils ont présenté jeudi dernier un nouvel arsenal de mesures préventives et répressives contre la violence dans et hors des stades et des patinoires : introduction d'un régime d'autorisation sous condition pour les matches des divisions supérieures, possibilité d'interdire la vente de boissons alcoolisées, de procéder à des fouilles corporelles (y compris des fouilles « intimes » en cas de soupçon concret) etc... Les coupoles du sport professionnel de masse, l'ASF pour le foot et la SHIF pour le hockey, ont protesté. : ces mesures «bureaucratiques et inutiles» vont rendre plus difficile l'organisation des championnats. Ben voyons. En attendant, nous, on compte fermement sur l'engagement de l'ASF et de la SHIF à nos côtés pour combattre la nouvelle loi genevoise sur les manifestations.

Le spectre de la faillite planait sur le Servette FC. Il s'est un peu éloigné, il plane un peu plus haut, mais il plane toujours. C'est ce qu'il y a de chiant, avec les spectres : on n'arrive pas à s'en débarrasser. Surtout que celui-là, ça fait des plombes qu'il plane sur le Servette FC et le stade, que ce soit ceux de Majid Pishyar aujourd'hui ou ceux de Marc Roger hier. Une société qui s'occupe du nettoyage du stade, et qui n'avait pas été payée depuis six mois, ce qui la menaçait elle-même de faillite, avait annoncé qu'elle déposerait une requête de mise en faillite du club, pour une facture de l'ordre de 90'000 francs. In extremis, Pishyar a versé un acompte de 30'000 balles pour éviter la faillite -on ne sait d'ailleurs pas s'il a payé lui-même ou avec le fric fourni par le «club des 100», une association de supporters friqués. Mais le spectre plane toujours. Le petit frère du spectre, qui planait au dessus du Neuchâtel Xamax, avait déja fondu sur sa proie, l'avait expédié ad patres et expédié son président au trou. On comprend que le précédent, s'il nous a bien fait marrer, a peu réjoui le président du Servette. Surtout qu'il a déjà sur le dos la Ligue suisse de football qui exige qu'il prouve qu'il a payé les charges sociales des joueurs et du personnel, et que d'autres créanciers que la société de nettoyage attendent d'être payés, certains ayant déjà mis le club aux poursuites. L'administrateur du Servette admet avoir « un problème de liquidités » et demande à ses créanciers « de se montrer patients, de faire des efforts », et de considérer qu'être créancier du Servette est un honneur qui suffit au paiement des créances, demander plus, ça serait vulgaire. Un petit chantage affectif pour permettre au club et à Pishyar de ne pas payer leurs factures. Le temps sans doute de demander à quelque collectivité publique complaisante de les payer à leur place, comme d'hab'...

09 mars 2012

Autophagie à Piogre : Le Servette reprend le Servette...

Et un sauveur suprême de plus, un !

Le patron du Servette annonce qu'il est prêt à reprendre le Servette (mais pas avec son argent, avec celui de mystérieux financiers restant anonymes), et le patron du Servette cède le Servette au patron du Servette pour un franc symbolique... Une tautologie, un enfonçage de portes ouvertes, un serpent de lac qui se mort l'appendice caudal ? Pas tout à fait : c'est le patron du Servette Hockey Club (SHC), qui annonce qu'il veut reprendre le Servette Football Club (SFC). La grande famille du sport, quoi. Ce tour de passe-passe a permis un ajournement de faillite, et une semaine de sursis pour le SFC. Hugh Quennec assurerait les charges courantes pendant un mois, le temps de vérifier dans quel état réel est le club de foot. Et après ? On fait quoi ? Qui paie quoi ? Et dans combien de temps tombera la première demande d'aide financière faite au canton et à la Ville ?

Footballeries pascales : cène, trahison, passion, résurrection, ascension, pentecôte...

n ne sait pas qui est derrière Quennec pour la reprise du FC Servette. On finira peut-être par le savoir, mais en attendant, toute l'opération sent furieusement le sauvetage improvisé. Majid Pishyar a été d’accord de renoncer à toutes ses créances ? De toute façon, elles étaient cuites, ses créances, et cuites par ses dettes... alors Quennec peut bien remercier Pisyhyar et en faire le président d'honneur du club (Marc Roger va être jaloux...) et Beer remercier Quennec et Pischyar, et la Tribune commencer à chanter les louanges des uns et des autres, mais si Hugh Quennec met 650'000 balles sur la table pour un mois, il doit encore trouver trois millions avant Pâques pour que le franc de la reprise du club ne soit pas que symbolique. Et comme nous le disent les Evangiles, s'il peut se passer bien des choses avant Pâques (Cène, trahison, tout ça...), c'est rien comparé à ce qui peut se passer après. Pour « sauver Servette », on a donc eu, successivement, un Français (Roger), un Espagnol (Vinas), un Iranien (Pishyar), maintenant un Canadien (Quennec)... Genève est vraiment une ville internationale... Mais quand Quennec aura jeté l'éponge, car il finira bien, comme ses prédécesseurs, par jeter l'éponge, on ira le chercher où, le Sauveur ? Chez les extra-terrestres ? Ou plus trivialement, dans les caisses des collectivités publiques ?
Parce qu'enfin, si on veut bien croire que « le Servette est sauvé » (une fois de plus), reste la question qui devrait fâcher mais qui pour l'instant ne fait que lasser : on fait quoi du stade ? on le fourgue à qui ? son exploitation est gérée depuis juillet 2011 par le SFC, qui doit payer une redevance annuelle de 150'000 francs à la fondation du stade, dans laquelle siègent encore les villes de Lancy et Genève et le canton (mais qu'attendent les collectivités publiques pour se débarrasser de se boulet qui leur a déjà coûté des dizaines de millions ?). Mais le SFC n'a pas payé sa redevance, et c'est une dette qui s'ajoute à toutes les autres. Si le SFC était mis en faillite, le stade n'aurait plus d'exploitant, et c'est la fondation qui devrait se charger, à nouveau, de l'être. Sans en avoir les moyens humains, ni même financiers. Devinez à qui on demandera alors de payer, directement ou non...
Alors on imagine, et sous nos doutes et nos ricanements quelques idées nous viennent, à peine moins absurdes que celle de prendre Genève pour Barcelone ou Manchester. Que le patron du club de hockey prenne la tête du club de foot présage certes d'une campagne coordonnée de mendicité institutionnelle, mais comme le club de hockey veut une nouvelle patinoire et que le club de foot n'arrive pas à remplir son stade, on pourrait vous synergiser tout ça sur le modèle (que nous souffle une copine verte, qu'on ne dénoncera pas) du cirque de Moscou, avec sa scène tournante en fonction des numéros présentés : Tous à la Praille, avec au choix une arène de gazon, une arène de glace et une arène de sable (pour la lutte, on va quand même pas renoncer à en organiser une, de fête fédérale...).
On nous assure que les Genevois tiennent à une grande équipe de foot, que Genève ne peut pas s'en passer... mais alors pourquoi diable cette équipe ne remplit-elle pas le stade, et pourquoi celui.-ci reste en moyenne aux deux tiers vide quand elle y joue ? Parce que le stade est trois fois trop grand ? certes... mais s'il se trouvait, plus simplement, que Genève n'est plus une ville de football, depuis que le football n'est plus un sport mais un commerce ? L'arrivée du patron du Servette Hockey à la tête du Servette Football réjouit le ministre cantonal des sports : « C'est important pour le football genevois et le sport en général ». S'il le dit, Charles... L'esprit de Pâques, sans doute (les chtis lapins et les gros oeufs ont déjà envahis les magasins) : Cène, trahison, passion, résurrection, ascension, pentecôte... Juste un conseil les gars : évitez le chemin de Damas, en ce moment : il est miné.