11 août 2010

Football : quand les Bleus méritent toute notre gratitude

Allumeeeez, le feuuuuuu !

Dès le coup de sifflet final de l'ultime match livré (clef en main) par l'équipe de France au Mondial sud-africain, ça a commencé. Comme à Gravelotte, c'est tombé sur les Bleus, de toutes parts Puis c'est remonté, de tout en bas, de tout au fond, là d'où débondent les égoûts médiatiques. ça avait déjà un peu suinté chez nous après la défaite de l'équipe de Suisse face à celle du Chili (la faute à l'arbitre, forcément), ça dégouline désormais un peu partout, ici et en France, en France sur le mode malin des pontifiantes certitudes à la Finkelkraut, et ici sur le mode bénin de l'ordinaire francophobie crapoteuse qui s'est étalée, après la défaite de l'équipe de France, dans les forums internet, sur Facebook et Twitter, dans les discussions de bistrot où les beaufs locaux, après s'être pris pour Francis Drake en clamant entre deux bières « on a battu l’Espagne », se sont pris ensuite pour les vengeurs de Marignan en exsudant leur francophobie...

Coq hardi

De quoi les Bleus sont-ils le nom ? des années Sarkozy -les années de l'immortel auteur du célèbre « casse-toi pauvre con », qui sermonne aujourd'hui les joueurs de l'équipe nationale de foot pour l'image qu'ils donnent de la France. La même que celle qu'il en donne lui-même depuis son élection : celle du fric et du trépignement infantile. Et à Sarkozy, la nomenklatura française fait écho : « Nous sommes la risée du monde », a sangloté le président de la fédération française de foot, un certain Escalettes. La risée du monde ? Plutôt son sel, l'ingrédient qui révèle et relève le goût. Et si le brave Escalettes poursuit en sanglotant encore : « j'ai 50 ans de valeurs morales qui se sont écroulées en un wekk-end », c'est peut-être qu'à mettre ses valeurs morales dans le foot, on finit par les perdre aussi sûrement qu'un épargnant son bas de laine placé chez Madoff. Parce qu'enfin, il conviendrait, plutôt que de s'en prendre aux joueurs (qui sont après tout les seuls dont un match de foot ait besoin...), de s'en prendre à un système qui a a multiplié par vingt depuis 1982 les dotations de la Coupe du Monde aux équipes nationales et aux clubs dont sont membres les joueurs de ces équipes, qui distribuera en 2010 420 millions de dollars aux participants aux jeux du cirque sud-africain... et qui paie trois millions d'euros l'entraîneur de l'équipe d'Italie, un million trois quart celui de l'équipe de Suisse, jusqu'à 8,8 millions celui de l'équipe d'Angleterre... mais 560'000 misérables euros le bouc-émissaire officiel de tous les malheurs de la France, Raymond Domenech. Honneur et reconnaissance aux Bleus, donc, d'avoir révélé ce que suscite le spectacle mondialisé du foot-pognon : non la critique de ce spectacle, ou de la transformation d'un sport en pompe à fric, mais la remontée des remugles racistes, l'ouverture de la chasse au bouc-émissaire, la confusion, soigneusement entretenue politiquement, entre le sort d'une équipe de foot et l'« honneur » d'un pays (et Sarkozy de réclamer la tenue d'« Etats Généraux du football français »... on a les Etats Généraux qu'on mérite, 221 ans après ceux de la Révolution...). Et le reste est à l'avenant, d'Alain Finkelkraut qui hoquète « On a rêvé avec la génération Zidane, aujourd’hui on a plutôt envie de vomir avec la génération caillera. L’équipe de France (est) une équipe de voyous à la morale de mafia qui se foutent de la France », à François Coppé, petit caporal de l'UMP, qui scrongneugneuse « Il est temps qu’on restaure la culture du commandement ». Le dernier des politicard peut bien se prendre pour Danton : avec leur incontestable talent de fouteurs de merde, les Bleus ont mis à nu l'âme du foot spectacle, du foot pognon, du foot drapeau, tel qu'il se donne à voir dans les stades mégalomanes imposés par la FIFA à l'Afrique du Sud. Qu'ils en soient ici remerciés.

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