10 mars 2009

Euromafias

EUROMAFIAS
On est rassurés : à coups de dizaines de millions, la paix a été conclue entre les familles de la mafia du foot pognon, l'UEFA (faîtière du foot européen), la FIFA (faîtière du foot international) et le G14 (lobby des clubs les plus riches, et donc les plus puissants, d'Europe). Le G14 va se dissoudre, et se transformer en une Association européenne des clubs (ECA), de droit suisse, qui se substituera au "Forum des clubs" de l'UEFA, s'ouvrira à une centaine de clubs européens de 53 pays, et enverra quatre représentants au Conseil stratégique de l'UEFA. Les bagarres entre le G14 et l'UEFA (ou la FIFA) étaient saignantes : le G14 réclamait pas moins d'un milliard de dollars d'indemnités rétroactives à la FIFA, pour les clubs ayant eu à déplorer en dix ans des blessures de joueurs lors de tournois internationaux organisés par la FIFA. Pour calmer le jeu, l'UEFA va claquer 157 millions de FS, et la FIFA 122 millions, ces modestes contributions étant allouées aux clubs qui "mettent à disposition" leurs joueurs pour les compétitions européennes et internationales, jusqu'en 2014. Ce sont donc les grands, gros et riches clubs, qui n'en auraient pas besoin qui vont en bénéficier. Comme disait l'autre, "l'argent va là où est déjà l'argent".

Faut dire que le foot professionnel, ça mobilise un paquet de pognon. Le foot professionnel est devenun une sorte d'archétype du libéralisme sauvage : la dérégulation règne, et la seule loi est celle du plus fort -c'est à dire celle du plus riche.
Lors de la saison 2006-7, vingt clubs ont généré des revenus de plus de 150 millions de francs suisses, dix des revenus de plus de 250 millions et deux de plus de 500 millions : en tête, le Real Madrid, avec 561,6 millions, et Manchester, avec 507,5 millions, suivis de près de Barcelone (467,1 millions), Chelseau (455,6 millions) et Arsenal (424,9 millions). Les clubs anglais croulent sous le pognon, et placent trois des leurs dans les cinq clubs les plus riches d'Europe -et donc du monde, et quatre autres dans les quinze suivants. Espagnols (deux clubs dans les cinq plus riches, trois dans les vingt plus riches) et Italiens suivent (quatre dans les vingt plus riches). Les vingt clubs les plus riches constituent ensemble une masse financière de 6 milliards de francs.
En France, l'attribution des droits de diffusion du Championnat de Ligue 1 avait vu, en 2004, Canal+ sortir 1,8 milliard d'euros sur trois ans pour s'adjuger ces droits, face à TPS. Mais ça ne suffisait pas à la Ligue de football professionnel, qui pour les droits 2008-2011 a organisé des enchères où on ne vend plus que des "lots" (il y en a douze : les dix meilleurs matches, les matches du samedi soir...), et où les enchère se poursuivent tant que la Ligue n'est pas satisfaite du montant atteint. Quant aux budgets des équipes de Ligue 1, ils vont de 25 (Auxerre) à 155 millions (Lyon) d'euros.
Par ailleurs, selon le magazine "Forbes", une dizaine de footballeurs ont engrangé des revenus supérieurs à 17 millions de dollars US en 2007. En tête du classement, David Beckham s'est fait plus de 50 millions de francs suisses, dont 38 en contrats publicitaires. Il est suivi, de loin, par Ronaldinho (34 millions FS), Michael Ballack (33,4 millions), Thierry Henry et Ronaldo (25 millions). Le joueur français le mieux payé est Djibril Cissé, qui se fait environ 6 millions brut par an. Une misère. Selon le journal sportif allemand "Sport Bild", les 26 joueurs allemands sélectionnés pour l'Eurofoot touchent ensemble 163 millions de francs de salaire et gratifications diverses par an. Le salaire global des joueurs de la seule équipe anglaise de Chelsea totalise 464 millions.
Au total, le "marché" du foot européen lors de la saison 2006-7 a pesé 22 milliards de francs, soit 1,6 milliard de plus que la saison précédente. Les cinq championnats nationaux les plus importants (Angleterre, Allemagne, Espagne, Italie et France) pèsent 11,5 milliards, et la seule Bundesliga allemande a dégagé 340 millions de bénéfices.

L'Eurofoot a aussi été l'occasion pour les lobbies rôdant autour des parlementaires, et pour les grandes entreprises planant au-dessus des lobbies, de distribuer le genre de petits cadeaux qui entretiennent l'amitié et les votes. Par exemple des billets pour les matches, dans des carrés VIP. Dans l'EuroJulie du 12 juin, on apprend ainsi que l'UDC Parmelin s'est fait inviter par EOS et le PDC Darbellay par le Crédit Suisse. Mais les grandes entreprises râlent quand même : les billets sont rtares, et s'il faut se les payer au marché noir, ils sont chers. Des dizaines de grandes entreprises désireuses de faire de petits cadeaux qui entretiennent l'amitié et les affaires, sous forme de billets de l'Eurofoot, sont démarchées par des "revendeurs non autorisés" qui essaient de leur fourguer des billets pour des prix allant jusqu'à 200'00 balles pour la finale viennoise, en passant par 60'000 balles pour un France-Italie, par exemple. Une multinationale américaine basées à Genève aurait ainsi payé 90'000 francs pour dix billets de demi-finale -des billets dont on n'est même pas sûr qu'ils seront valables, l'UEFA ayant annoncé qu'elle ne laissera pas entrer dans les stades de porteurs de billets qui n'auraient pas été vendus par les vendeurs quelle a autorisés. Quand on détient un monopole, on le défend...

L'Euro2008 n'était pas terminé que les pontes de l'UEFA començaient déjà à ouvrir les caisses de l'Euro2012, organisé par la Pologne et l'Ukraine (si Poutine n'envoie pas ses chars avant) : un chantier de 46 milliards d'euros, pour des travaux d'infrastructure (stades, aéroports, hôtel.s, routes etc...) , dont sept milliards pour les seules infrastructures de Kiev, 20 milliards avec celles des cinq autres villes ukrainiennes, plus 26 milliards pour les villes polonaises (l'Union européenne en financera la plus grande partie, sans avoir aucune capacité de régulation et de contrôle sur l'UEFA, grande organisatrice et grande bénéficiaire de manifestations payées par les collectivités publiques (locales, régionales, nationales, européenne). L'UEFA, organisation sans but lucratif (on ne ricane pas, dans le fond), et ne payant pas d'impôts (on ne pleure pas, devant), réalise un chiffre d'affaire de plus d'un milliard par an (plus de deux milliards les années d'Eurofoot, probablement plus de trois milliards en 2008). Surtout, elle entend maîtriser les droits de retransmission TV, sa principale source de revenus, dont le montant a littéralement explosé : l'équivalant de 6,9 millions d'euros en 1988, de 28,3 millions en 1992, de 80 millions en 1996, de 140 millions en 2000, de 560 millions d'euros en 2004 et de 1,3 milliard en 2008... En quatre ans, de 2004 à 2008, les droits commerciaux sont passée de 183 à 250 millions d'euros (461 millions de recettes de sponsoring et merchandising lors de l'Eurofoot 2008). Il n'y a guère que les entrées payantes dans les stades qui plafonnent (autour de 80 millions habituellement, 150 millions pour l'Euro) -c'est d'ailleurs normal, les matches et le jeu sont ce qui importe le moins dans l'Eurofoot. Mais l'opacité la plus totale règne sur le montant réel des contrats passés avec les sponsors et les partenaires privés. On ne sait qu'une chose : ils se chiffrent en dizaines de millions d'euros.
Or aucun organisme de surveillance n'encadre la bénéficiaire (l'UEFA) de cette masse financière.

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