09 mai 2012

Fonds de tiroirs


L'ancien patron du FC Servette, Francisco Vinas, qui se taisait depuis trois ans, est sorti de son silence, dans « Le Matin Dimanche » de dimanche dernier. Pour dire son fait à son successeur, Madjid Pishyar, en commençant par rappeler que lui, Vinas, avait sorti le club de la merde où l'avait laissé Marc Roger, et qu'il n'avait cédé le club à Pishyar que sous la pression d'attaques personnelles constantes, de la part des partisans de Pishyar (qu'on entend curieusement peu, en ce moment). Qui a donc pu reprendre un FC Servette sans dettes, avec plus de deux millions en caisse. Mais le laisse sans un radis, avec quelques millions de dettes. De toute façon, pour Vinas, faire vivre un club de foot d'élite à Genève, «c'est vouloir exporter le foot au Groenland » : en clair, l'écrasante majorité des Genevois (dont nous, ici) se contrefoutent de la présence ou non d'un club genevois en division A, B  ou Z du foot suisse. Vinas se dit « déçu de voir à quel point les Genevois et la presse locale se sont fait embobiner » et se demande comment ils ont pu « gober tout ce qu'à dit M. Pishyar ? ». Ben, c'est simple : ils auraient gobé n'importe quoi pourvu que ce n'importe quoi se conclue par « hop Servette, on va gagner ! », ce genre de conneries pour supporters, quoi. Et ça continue : la « Tribune » touille aujourd'hui la même sauce qu'à l'arrivée de Pishyar. Et s'apprête à nous la resservir avec n'importe quel repreneur.  C'est comme au bonneteau : tant qu'il y a des congres assez congres pour se laisser pêcher, y'a pas de raison d'abandonner la pêche au congre...

Fin janvier, la coupole européenne du sport-pognon (l'UEFA, donc) a annoncé dans un rapport que le déficit accumulé de 665 clubs européens atteignait 1,64 milliard d'euros, soit 435 millions de plus en un an, que 56 % des clubs de première division européenne avaient enregistré des pertes nettes en 2011 (en France, sur 20 clubs de la division supérieure, quatorze étaient en déficit, six enregistrant des pertes supérieures à cinq millions d'euros) et que 78 clubs avaient claqué la totalité de leurs recettes dans les seuls salaires, parfois mirobolant, de leurs joueurs et entraîneurs. Bon, nous, on vous dit ça, hein, c'est pour vous consoler des déboires du Servette : le sport-pognon, c'est la merde partout...

Le président du Servette Hockey-Club, Hugh Quennec,  ayant repris le Servette Football Club, et le Servette Football Club ayant précédemment repris l'exploitation du Stade de Genève, est-ce que Hugh Quennec va devoir aussi assumer le trou de la Praille ? Grave question, car le stade est impossible à rentabiliser : trop grand pour les besoins sportifs locaux, il ne peut même pas être utilisé pour y organiser  plus de trois concerts par an, afin de limiter les nuisances pour les riverains. Certains avaient bien pensé à en faire usage pour accueillir la fête fédérale de gymnastique mais, las ! les rupestres ont préféré Estavayer. Bon, ben avec tout ça on n'est pas plus avancés... on en fait quoi de ce truc ? le lieu unique pour les manifestations autorisées, après l'adoption par le bon peuple d'une loi durcissant les conditions de la liberté de manifester ? le lieu de détention des participants aux manifestations non autorisées ? Un stade Olivier-Jornot, en quelque sorte ?

A une heure du matin, dimanche dernier, une quinzaine de supporters du SFC ont provoqué une bagarre générale à la rue de l'Ecole de Médecine, en s'en prenant aux clients de trois bistrots, avant de déguerpir à l'arrivée de la police... Le Servette est de retour, ses supporters aussi, chouette...

On a retrouvé ça dans un vieux « GHI »  (du 16 mars de l'année dernière), et on savoure, sans autre retenue que celle que pourrait nous donner le temps qui passe et les illusions qui trépassent :
« Stade de Genève : à l'abri des soucis financiers.
Le Servette FC reprend l'exploitation du Stade pour les 33 prochaines années.
La signature de ce contrat entre le Servette FC et la Fondation du Stade de Genève règle tous les problèmes de financement, résume dans un large sourire Mark Muller, conseiller d'Etat en charge du Département des constructions ». Et Benoît Genecand, président de la Fondation du Stade, d'expliquer avoir voulu «  prémunir (la fondation) des problèmes financiers sur la durée», et Madjid Pishyar, alors président du Servette FC, annonce vouloir « doter Genève d'une académie du foot ». Et c'était illustré d'une zoulie photo d  Pishyar, Muller et Genecand, lequel devrait s'interroger sur son avenir vu le parcours des deux autres. L'article se clôt par cette citation d'un « proche observateur » : « J'espère que Madjid Pishyar a les moyens de ses ambitions »... La réponse est non. Mais pour les moyens de nous faire encore marrer un an après, la réponse est oui.

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