09 avril 2007

LES PETITS CADEAUX ENTRETIENNENT LE STADE

LES PETITS CADEAUX ENTRETIENNENT LE STADE

Or donc, l'entreprise Implenia, ex-Zschokke, a reçu son petit cadeau : onze millions, pour payer une vieille facture du stade de la Praille. Ces onze millions ont été prélevés sur l'argent accordé au Fonds d'équipement communal (FEC, fonds commun aux 45 communes genevoises) par le Grand conseil qui y avait transféré des ressources allouées auparavant aux communes. L'exercice auquel se sont livré les autorités cantonales consiste donc à remplir les caisses d'un organisme intercommunal (le FEC) avec de l'argent revenant aux communes, pour ensuite vider les caisses du dit organisme pour payer une dette de la Fondation du stade, en échappant ainsi à un référendum (puisque les décisions du FEC ne sont pas soumises à référendum).

La procédure utilisée pour vider les caisses du FEC est assez intéressante : le cadeau accordé à la Fondation du stade l'a été par le Conseil du FEC alors que l'ordre du jour ne prévoyait que d'avaliser la nouvelle loi modifiant les statuts. Ainsi les membres du conseil du fonds ne pouvaient se douter qu'on allait prendre une décision de pomper onze millions au profit de la fondation du stade, décision pour laquelle ils n'avaient donc pu recevoir de mandat. Le conseiller administratif (libéral) de la Ville Pierre Muller, excusé, assure qu'il s'y serait fermement opposé pour respecter le vote des citoyens de sa commune, comme il l'a déclaré publiquement.

Deuxièmement, cette décision du FEC a été prise sur un préavis favorable de l'ACG, là encore sans que l'ordre du jour de l'ACG ne mentionne ce point spécifique, et donc sans que les exécutifs ne soient informés de la nécessité de prendre position sur ce sujet, ce qui ressort d'un courrier de
l'ACG adressé aux Maires, Conseillers administratifs et Adjoints, et signé par le secrétaire général Michel Hug, qui commence par cette phrase révélatrice (adressée aux Maires, adjoints et Conseillers administratifs) :
"Vous avez sans doute été surpris d'apprendre récemment dans la presse que le Fonds d'équipement communal (FEC) avait épongé les dettes de la Fondation du Stade de Genève". Les magistrats municipaux en ont effectivement été surpris, puisque personne n'avait pris la peine de les informer qu'une telle décision pouvait être prise, en violation des règles générales de procédure qui impliquent le droit de chacun (en l'occurrence les communes) d'être entendu et de pouvoir se prononcer sur une décision qui le concerne, ce qui implique évidemment que l'on sache que cet objet fera l'objet d'une décision. Le procès-verbal de la séance du comité de l'ACG du 4 décembre 2006 ne fait d'ailleurs mention que d'une information, tronquée, et non d'une décision : "Le Président (Pascal Chobaz) annonce que le Conseil d'Etat envisage de négocier avec la société Implenia pour tenter de résoudre définitivement les problèmes liés à la créance que le Stade de la Praille a envers cette société". Le 30 janvier, le Comité Praille s'est adressé aux élues et élus des 45 communes genevoises pour les inviter à exiger la communication des convocation s et des procès-verbaux des réunions du FEC et de l'ACG, et à envisager des recours au Tribunal administratif et/ou au Tribunal fédéral, ainsi qu'une dénonciation à la
Cour des comptes.
Le 13 février, "A Gauche Toute !" s'est adressée au Conseil administratif pour lui demander de recourir contre "la décision illégale du Conseil" du FEC.

L'entourloupe ne s'arrête pas à la manipulation de l'ACG et du FEC : premièrement, le don prélevé dans les caisses du FEC sert à payer la dette d'une fondation de droit privé à l'égard d'une entreprise privée. Or ce fonds est légalement destiné à permettre la prise en charge des intérêts des emprunts que les communes ont contractés pour faire face à leurs frais d'équipement. Il peut également être utilisé pour financer les charges que les communes sont appelées à supporter dans le cadre de leurs responsabilités ou toute prestation publique intercommunale ou cantonale, mais pas pour assurer le paiement d'une dette privée -celle de la fondation du stade- à l'égard de l'entreprise Zschokke (Implenia).

Deuxièmement, cette nouvelle possibilité d'utilisation du FEC, introduite dans la loi en juin 2006, est limitée aux années 2006 et 2007. En faire usage pour régler une dette de plusieurs années antérieure est donc à la fois hors attribution et hors délais.

Le Comité Praille a invité les communes à exiger la communication des convocations, sous leur forme originale, aux réunions du FEC et de l'ACG, ainsi que les procès-verbaux de ces réunions.
Par ailleurs, deux recours au Tribunal fédéral et un recours au Tribunal administratif genevois ont été déposés par des membres du Comité Praille.

La Ville de Genève a de son côté demandé aux 44 autres communes de demander avec elle la convocation d'une Assemblée générale de l'Association des communes genevoises pour débattre de la méthode utilisée par le Conseil d'Etat et les exécutifs de l'ACG et du Fonds d'équipement communal pour faire payer à ce dernier les dettes de la Fondation du Stade. En outre, le 9 février, le Conseil administratif de la Ville, qui a "des doutes sur la régularité" de la manoeuvre, a dénoncé à la Cour des comptes l'attribution par le FEC des 11 millions remboursant la dette de la Fondation du stade.
Par ailleurs, 21 conseillères et conseillers municipaux de la Ville de Meyrin, représentant presque tous les partis, et les deux tiers du Conseil municipal, ont exprimé le 6 mars leur "profonde indignation" au Conseil d'Etat, à l'ACG et au FEC, à qui ils ont demandé d'annuler le don fait à la Fondation du stade, et de restituer les onze millions au FEC.

Enfin, le Procureur général a été saisi d'une dénonciation pour une possible gestion déloyale des fonds publics, puisque le FEC a été utilisé pour toute autre chose que ce à quoi il est destiné.

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